Pour prendre la mesure de ce qui a été l’occasion d’échanges avec les différents dicastères (ministères) et avec le Pape, lors de cette semaine que notre évêque a passé à Rome (du 6 au 11 septembre), et pour mieux comprendre ce que le Pape attend de nous à travers la vaste consultation qu’il engage pour toute l’Église (synode sur la synodalité), notre évêque nous a invité à une rencontre suivie d’un repas partagé, le 9 octobre à Pamiers :
Voici un bon article des services de communication du Vatican, résumant bien le compte rendu que nous a fait notre évêque.
Les évêques du sud de la France ont évoqué les défis de leurs diocèses avec le Pape
(Cyprien Viet – Cité du Vatican)
Pas de discours formel, mais un échange à bâtons rompus, dans une ambiance fraternelle et même une certaine familiarité: quelques heures après leur rencontre avec le Pape François, Mgr Pierre-Marie Carré, Mgr Jean-Marc Aveline et MgrRobert Le Gall, respectivement archevêques de Montpellier, Marseille et Toulouse, ont tenu un point presse pour raconter leur rencontre de ce vendredi 10 septembre avec le Pape François, la «cerise sur la gâteau» de cette semaine intense durant laquelle ils ont pu échanger avec les responsables des différents organes de la Curie romaine.
Mgr Le Gall et Mgr Carré, qui avaient déjà vécu plusieurs fois cette expérience, ont raconté l’évolution de l’ambiance des visites ad limina au fil des années: après les entretiens individuels avec Jean-Paul II, les audiences de groupe ont été instituées sous le pontificat de Benoît XVI, puis le Pape François a voulu donner un caractère plus spontané et informel aux échanges en allégeant fortement le protocole. «Le Pape nous a lui-même distribué des bouteilles d’eau et nous a montré où se situaient les toilettes», ont raconté les évêques avec un certain étonnement, en racontant l’atmosphère de cette rencontre, qui a duré plus de deux heures.
Une fraternité renouvelée
Des frères en joie !
Concernant la dynamique globale de la semaine, Mgr Aveline a souligné l’importance de la dimension spirituelle, car ces visites ad limina sont d’abord un pèlerinage sur les tombes de saint Pierre et saint Paul. Cette semaine a aussi donné l’occasion de renforcer la fraternité entre évêques, ainsi que le lien entre les évêques et les différentes réalités vaticanes, avec une connaissance mutuelle «qui s’est affirmée et qui s’est affinée au fil des jours».
Parmi les nouveaux responsables de la Curie, ils ont été particulièrementintéressés par leurs échanges avec Mgr Lazare You Heung-sik, nouveau préfet sud-coréen de la Congrégation pour le Clergé, qui leur a expliqué que la démarche missionnaire suppose de «ne pas s’adresser aux gens seulement avec la tête, mais aussi avec le coeur, les mains et les pieds». Ils ont apprécié cette sensibilité asiatique qui apporte un vrai renouveau dans l’approche du ministère sacerdotal.
Le récent Motu proprio Traditionis Custodes a été au coeur des échanges avec le nouveau préfet de la Congrégation pour le Culte divin, Mgr Arthur Roche, et avec le Pape François lui-même, qui est revenu longuement sur la genèse de ce texte, rendu nécessaire par la dérive idéologique de certains groupes qui, tout en prétendant défendre la Tradition, finissaient par «rompre avec la Tradition de l’Église, en refusant un Concile», en l’occurrence le Concile Vatican II.
Mais le Pape a aussi insisté sur l’importance d’un soin pastoral bienveillant vis-à-vis des groupes de sensibilité traditionnelle : il ne s’agit pas de mettre un terme brutal à l’expérience vécue chrétiennement par des groupes constitués, mais d’éviter que le «vieux rite» ne finisse par se substituer au rite ordinaire dans la psychologie et la pratique de certaines personnes, influencées notamment par les réseaux sociaux. «L’enjeu n’est pas simplement liturgique, mais ecclésiologique», a expliqué Mgr Le Gall, qui a lui-même été membre de la Congrégation pour le Culte divin durant plus de dix ans.
Une attention aux défis de la société
L’écologie devient également de plus en plus un sujet central pour les évêques de France, à la suite de Laudato si’. Mais sur ce terrain aussi, émergent des dérives idéologiques dangereuses, notamment quand l’être humain finit par être culpabilisé d’exister, avec la montée en puissance des courants de pensée anti-natalistes. Mgr Aveline a donc expliqué que l’Église doit remplir une mission anthropologique, pour protéger la famille et la vie, tout en encourageant à une meilleure harmonie entre l’homme et son environnement. Les groupes de réflexion liés à Laudato si’, qui ont été créés dans de nombreux diocèses, sont une formidable occasion pour faire travailler ensemble des personnes de sensibilités diverses, et «pas seulement des piliers d’Église». Ils permettent d’infuser une anthropologie chrétienne dans les débats de société. Concernant l’élection présidentielle à venir, le Pape a encouragé les évêques à manifester une attention pastorale et une proximité avec les personnes engagées en politique.
Salutation fraternelle !
Le défi de l’intégration a aussi été au coeur des échanges avec le Pape François, notamment concernant la présence auprès des populations musulmanes.L’immigration peut aussi apporter une nouvelle vivacité aux communautés chrétiennes, a insisté Mgr Aveline, donnant l’exemple d’une petite église d’un quartier marseillais à majorité musulmane, et dont la fermeture avait été envisagée. Finalement, le diocèse continue à la faire vivre pour un petit noyau de catholiques, et cette communauté pourrait très bien grandir et se redéployer dans les années à venir en fonction des mouvements de population, comme cela s’est vu dans d’autres pays, comme en Suède, où l’Église catholique a connu une très forte croissance grâce à l’arrivée de populations originaires d’Amérique latine. Le Pape a souligné cet exemple dans son dialogue avec les évêques, pour montrer que le christianisme se diffuse et se régénère aussi par les migrations.
L’évolution des relations entre Rome et la France
Mgr Carré a remarqué, au fil des 4 visites ad limina auxquelles il a participé, une évolution dans l’attitude des responsables de la Curie. Ils ne sont plus «des gens qui « savent » et qui nous font la leçon, mais des frères», a-t-il souligné. La dimension fraternelle a été présente dans l’ensemble des échanges, notamment au sujet de la dynamique synodale, qui doit se vivre dans l’écoute de l’Esprit Saint, et non pas dans une logique de «parlement». Dans la démarche synodale, après le temps des débats et des conflits éventuels, la consolation est un signe important de la présence agissante de Dieu dans les coeurs, a expliqué le Pape aux évêques. La rencontre avec le Secrétariat général du Synode a également été une expérience très dynamisante pour les évêques, qui ont compris que ce processus devait être avant tout une expérience d’écoute, de discernement, de relecture des réalités déjà vécues, et non pas susciter une charge de travail supplémentaire.
Le seul petit regret exprimé par les évêques du sud de la France au terme de cette semaine à Rome concerne un certain effacement de la langue française au sein duVatican, ce qui se ressent notamment dans le manque de traductions en français de certains documents officiels. Ils sentent que «la France n’est plus qu’un pays de l’Europe, qui n’est plus au centre de l’actualité mondiale», tout en reconnaissant que c’est aussi leur rôle de mettre à la disposition du Saint-Siège des personnes compétentes et disponibles pour y faire rayonner la francophonie.
Quant à l’hypothèse d’un voyage du Pape en France, le projet n’est pas envisagé à court terme, mais l’archevêque de Marseille a tout de même redit à François qu’il serait le bienvenu dès qu’il le souhaitera. «Il ne s’agit pas de lui forcer la main,mais de nourrir son discernement», a souri Mgr Aveline.