Premier point d’étape du synode sur l’Amazonie

par | 28/10/2019

 

Les mots-clés du Document final du Synode sur l’Amazonie

(source : très bon article de synthèse sur le site des Xavières – Nathalie Becquart –  lien )

ALLIANCE

A travers tout un processus d’écoute des populations amazoniennes, ce synode a été une caisse de résonance des cris des plus pauvres et des cris de la terre. Il a permis de dresser un diagnostic partagé sur la réalité de la situation dramatique que vit l’Amazonie. L’Eglise a entendu les cris de cette région symbole de la vie et en même temps traversée par des forces de destruction, conséquence d’un modèle qui met l’appât du gain avant le respect de l’humain et de la vie. L’Eglise affirme fortement qu’elle se fait l’alliée des peuples amazoniens pour les défendre, les accompagner, leur annoncer la Bonne Nouvelle du Christ libérateur (n°45) Elle veut aussi mettre en œuvre sa vision de l’écologie intégrale en s’alliant avec tous les partenaires prêts à défendre comme elle les droits des plus pauvres et les droits de la terre.

CONVERSION

En regardant et analysant la réalité amazonienne, l’Eglise au synode a entendu un appel prégnant à la conversion intégrale. Conversion qui se décline en 4 dimensions : la conversion pastorale, la conversion culturelle, la conversion écologique et la conversion synodale. Ce texte est donc avant tout un appel très fort à « la conversion profonde de nos schémas et structures au Christ et à l’Evangile » (n°5) qui fait prendre conscience de l’urgence d’agir devant la situation actuelle de l’Amazonie.

ECOLOGIE INTEGRALE

Dans la suite de Laudato Si, il est devenu vraiment clair avec ce synode que l’Eglise doit mettre en œuvre et promouvoir « le nouveau paradigme de l’écologie intégrale, la sauvegarde de la « maison commune » et la défense de l’Amazonie(n°4). Ce texte affirme très fortement l’enjeu de chercher de proposer de nouvelles façons de faire pour déployer Laudato Siet sa vision de l’écologie intégrale. Face au modèle économique productiviste destructeur, le défi est de proposer de nouveaux modèles de développement équitable, solidaire et durable (n°71). Est ici présenté un appel fort à la conversion écologique personnelle et communautaire pour entrer dans le nouveau paradigme du développement écologique intégral.

LA SYNODALITE

Tout le chapitre V de ce document final est consacré à la nécessaire conversion synodale parce que la synodalité est finalement la manière de mettre en œuvre la vision de l’écologie intégrale et les principes de Laudato Si: « tout est lié », le dialogue, la participation, la spiritualité de la création… La synodalité missionnaire est la manière d’être de l’Eglise pour relever les défis de la mission en Amazonie. Elle demande de renforcer la culture du dialogue, l’écoute réciproque, la participation de tous en appelant fortement « la participation effective des laïcs au discernement et à la prise de décision, en renforçant la participation des femmes » (n°92).

MISSION ET DIALOGUE

Ce synode a été traversé par un grand souffle missionnaire et il est beau d’y rencontrer de très belles figures de pasteurs et laïcs, religieux(ses) très proches de leur peuple, passionnés par la mission d’annonce de l’Evangile, engagés et proches des pauvres. Est rappelé au n°21 que « l’Eglise est par nature missionnaire ». En Amazonie cette Eglise missionnaire prend le visage d’une Eglise itinérante « tente de la rencontre » pour se faire « samaritaine, miséricordieuse, solidaire, servante » de « tous, en particulier des premiers peuples, des pauvres, des exclus et des autres » (n°22). En même temps cette Eglise, appelée à porter une attention particulière aux indigènes, aux migrants, aux jeunes avec une spiritualité d’écoute et de proclamation, doit s’engager résolument dans le dialogue œcuménique, interreligieux et culturel (n°23).

INCULTURATION

L’enjeu pour l’Eglise en Amazonie marquée par l’histoire de la colonisation est de prendre vraiment un visage amazonien et de vivre une « décolonisation ». Cela demande une conversion culturelle pour « être présent, respecter les valeurs de la culture amazonienne, vivre et pratiquer l’inculturation et l’interculturalité dans la proclamation de la Bonne Nouvelle » (n°41). L’inculturation découle de l’Incarnation. Elle est « l’incarnation de l’Evangile dans les cultures locales et en même temps l’introduction de ces cultures dans la vie de l’Eglise » (n°51). Doit donc se déployer une catéchèse inculturée qui prend notamment en compte la piété populaire, un théologie inculturée… et un dialogue interculturel. Dans cette optique le synode a abouti à la proposition très concrète de créer un rite amazonien spécifique (n°116 à 119) qui s’ajouterait aux 23 rites différents déjà existants dans l’Eglise catholique.

MINISTÈRES

De nombreuses interventions et discussions pendant le synode ont eu trait à la question des ministères donnant de reconnaître l’engagement fort des laïcs et de la vie consacrée sur le terrain auprès des communautés amazoniennes. « Il est urgent pour l’Eglise en Amazonie de promouvoir et de conférer des ministères pour les hommes et pour les femmes d’une manière équitable » (n°95).

FEMMES

La question des femmes a été très présente durant ce synode parce qu’elles jouent un rôle majeur dans l’Eglise amazonienne et aussi parce qu’elles sont confrontées à de nombreux défis et problèmes dans la société amazonienne. De nombreux évêques ont exprimé leur reconnaissance et relevé combien les 35 femmes présentes au synode – laïques et religieuses – ont joué un rôle majeur. Le document final leur consacre plusieurs paragraphes (99->103) et affirme : « Nous valorisons le rôle des femmes en reconnaissant leur rôle fondamental dans la formation et la transmission des cultures, dans la spiritualité, dans les communautés et les familles. Il est nécessaire que l’Eglise assume avec plus de force son leadership au sein de l’Eglise, et qu’elle le reconnaisse et le promeuve en renforçant sa participation aux conseils pastoraux des paroisses et des diocèses, ou même dans les instances de gouvernement » (n°101). Et il plaide aussi pour que « le ministère institué de la « femme leader de communauté soit créé et reconnu au service des exigences changeantes de l’évangélisation et des soins communautaires » (n°102).

DIACONAT FÉMININ

Ce sujet a été bien présent, abordé et discuté de manière très libre et ouverte. De nombreux groupes se sont prononcés pour et le document final présente cette demande d’instaurer le diaconat permanent pour les femmes en souhaitant partager ses expériences et réflexions à la commission que le Pape François avait instaurée pour étudier cette question. Dans son discours de clôture du synode, le Pape François a indiqué qu’il souhaitait relancer le travail de cette commission en y ajoutant de nouveaux membres et en la reliant à la Congrégation pour la Doctrine de la foi. A suivre…

L’EUCHARISTIE ET LES VIRI PROBATI

Parce que l’Eucharistie est centrale pour la vie chrétienne, et que « l’Eglise vit par l’Eucharistie », « les communautés chrétiennes vivantes crient vraiment pour la célébration de l’Eucharistie ». Pour faire face à la situation amazonienne où beaucoup de communautés sont privées d’Eucharistie par absence de prêtres, le synode demande clairement la possibilité d’ordonner « prêtres des hommes idoines et reconnus par la communauté, qui ont un diaconat permanent fécond et reçoivent une formation adéquate au presbytérat, pouvant avoir une famille constituée et stable, pour soutenir la vie de la communauté chrétienne par la prédication de la Parole et la célébration des sacrements dans les endroits les plus reculés de la région Amazone » (n°11 voté à 128 voix pour, 41 contre).

ESPÉRANCE

Finalement ce synode a redonné et affermi une espérance pour les peuples amazoniens et pour le monde entier. En se mettant à l’écoute des cris des pauvres et des cris de la terre, en regardant la réalité de la région amazonienne avec compassion et empathie, en se faisant caisse de résonance et porte-voix de ceux qui subissent l’oppression sans toujours pouvoir se faire entendre, en portant à Rome et dans le monde entier à travers les médias la voix des périphéries, la voix des sans-voix, ce synode a ouvert « un questionnement prophétique et un message d’espérance à toute l’Eglise et au monde entier » (n°81). Ce document final traduit l’audace, la créativité, la fraternité et la communion vécue durant cette marche ensemble qui fut un discernement communautaire à l’écoute de l’Esprit. Il invite chacun à prendre la mesure de ce qui se passe en Amazonie, laboratoire pour la société et pour l’Eglise, pour oser s’engager avec audace et créativité sur un chemin de conversion au service de la vie.