Un défi culturel

 

Un des grands risques de notre temps, face à la grave menace que la crise écologique fait peser sur notre planète, est alors de ne pas lire ce phénomène comme l’aspect d’une crise globale, mais de nous contenter de chercher des solutions – bien que nécessaires et indispensables – pure­ment environnementales. Or, une crise globale demande une vision et une approche globales, qui passent avant tout par une renaissance spirituelle au sens le plus noble du terme.

Paradoxalement, les changements climatiques pourraient devenir une opportunité pour que nous nous posions les questions de fond sur le mystère de l’être créé et sur ce pourquoi il vaut la peine de vivre.  Cela nous conduirait à une profonde révision de nos modèles culturels et économiques, pour une croissance dans la justice et dans le partage, dans la redécouverte de la valeur de chaque personne, dans l’engagement pour que tous ceux qui sont aujourd’hui à la marge puissent être inclus et que tous ceux qui viendront demain puissent encore jouir de la beauté de notre monde, qui est et res­tera toujours un don offert à notre liberté et à notre responsabilité.

La culture dominante – celle que nous respirons à travers les lectures, les rencontres, les loisirs, les médias, etc. – est fondée sur la pos­session : des choses, du succès, de la visibilité, du pouvoir. Celui qui possède beaucoup a beaucoup de valeur, il est admiré, considéré et il exerce une certaine forme de pouvoir ; tandis que celui qui a peu, ou rien, risque de perdre jusqu’à son propre visage, car il disparaît, il devient l’un de ces invisibles qui peuplent nos villes, une de ces personnes auxquelles nous ne faisons pas atten­tion ou avec qui nous cherchons à ne pas entrer en contact.

 

 

Certainement, chacun de nous est avant tout victime de cette mentalité, car nous sommes bombardés par elle de bien des manières. Dès l’enfance, nous grandissons dans un monde où une idéologie mercantile diffuse, qui est la véri­table idéologie et pratique de la mondialisation, stimule en nous un individualisme qui devient narcissisme, avidité, ambitions élémentaires, négation de l’autre… Par conséquent, dans notre situation actuelle, l’attitude juste et sage, plutôt que l’accusation et le jugement, est avant tout celle de la prise de conscience.

Nous sommes impliqués, en effet, dans des structures de péché (comme les appelait saint Jean-Paul II) 1 qui produisent le mal, polluent l’environnement, blessent et humilient les pauvres, favorisent la logique de la possession et du pouvoir, exploitent de manière exagérée les ressources naturelles, contraignent des popula­tions entières à laisser leurs terres, alimentent la haine, la violence et la guerre. Il s’agit d’un trend culturel et spirituel qui opère une distor­sion de notre sens spirituel qui lui, au contraire­ – puisque nous avons été créés à l’image et à la ressemblance de Dieu -, nous oriente naturellement vers le bien, vers l’amour, vers le service du prochain.

Pour toutes ces raisons, le tournant ne pourra venir simplement de notre engagement ou d’une révolution technologique : sans négliger cet aspect, nous avons besoin de redécouvrir des personnes, c’est-à-dire des hommes et des femmes, qui reconnaissent être incapables de savoir qui elles sont sans les autres, et qui se sentent appelées à considérer le monde autour d’elles non comme un but ensoi, mais comme un sacrement de communion.

 

Notre Mère le Terre