Le silence de la honte

Face à ce que l’actualité sur notre Église, les mots du Père Abbé d’En Calcat sonnent juste. Je n’ai pas envie d’y ajouter quoique ce soit…

LA GRANDE DÉCULOTTÉE

Abus sexuels, enquêtes et révélations en cascade : qu’on le veuille ou non, qu’on les regarde ou qu’on les ignore, l’Eglise va de scandale en scandale. Tout le corps est touché : les structures les plus hautes et les plus lointaines comme les plus ordinaires et les plus proches. La nausée succède à la nausée, la honte à la honte.

Pour l’Eglise, pour tous ceux qui sont de l’Eglise, il n’y a pas quarante postures possibles.

C’est la déculottée, point.

Au sein de chaque institut, chaque diocèse, chaque monastère, une affaire, des histoires, plus ou moins récentes, et la nécessité de constater le silence qu’on a fait, imposé ou permis, le déni de justice… Pour ne pas perdre la face, par peur du qu’en dira-t-on, par peur d’être éclaboussé.

Les bons chrétiens, à commencer par les plus responsables, se découvrent alors pharisiens, soucieux de respectabilité, d’honorabilité. On ergotait à qui mieux mieux sur la masturbation dans des catéchismes mais on faisait le black-out sur des crimes dans la vraie vie.

Aucune exemplarité à retrouver n’est imaginable. Le brillant d’une moralité impeccable ne sera plus jamais crédible. D’ailleurs, s’il y a une projet qui ne ressemble pas à Jésus, c’est celui de l’exemplarité. Ce sont les pécheurs et les malades qu’il est venu appeler, il n’a cessé de le rappeler, de le montrer.

Certes, il leur a dit : « vous êtes la lumière du monde » ! Oui, mais quel genre de lumière ?

Aujourd’hui, le grand lustre s’est effondré, le spot surpuissant a été fracassé, la lampe qui croyait éclairer le monde a été brisée, sans remède.

La lumière de l’époque de Jésus n’est pas de cette sorte, elle est feu, flamme, aucun court-circuit ne la menace ; elle ne se propage que par contact, proximité, relais, humblement, comme la foule des petits cierges illumine la nuit pascale. Elle est très humble, la lumière du monde, quand le monde tout entier est plongé dans la nuit.

Que faire alors, puisque c’est la nuit, de nouveau ?

Comme Nicodème le pharisien, commencer par allumer sa lanterne, aller trouver Jésus de nuit, et lui demander instamment : « comment peut-on renaître, quand on est vieux ? »

frère David, père abbé d’En Calcat   –  voir le site de l’Abbaye