POUR UNE EGLISE SYNODALE
En apportant leur contribution au Synode sur la synodalité, cette démarche spirituelle lancée par le pape François, plus de 440 Ariégeois ont souhaité que l’annonce de la Bonne nouvelle résonne de manière plus claire, plus simple, plus fraternelle. Ils désirent que là où ils vivent et plus généralement sur toute la planète, on puisse goûter et voir comme est bon le Seigneur.
LES CONTRIBUTIONS
(1) Au nombre de 129, elles sont le fruit de réflexions individuelles (67%) ou collectives (33%). Environ 390 personnes ont travaillé collectivement. Au surplus, certaines contributions individuelles ont été rédigées après des rencontres de groupe. Les femmes (67%) ont participé plus massivement que les hommes.
La plupart du temps, ces contributions traitent de plusieurs sujets de préoccupation. Elles émanent de presque tous les secteurs du diocèse, de personnes diverses, de couples, de groupes notamment paroissiaux créés pour l’occasion, de prêtres, de fraternités, de la fraternité des diacres, de mouvements ou services d’Eglise, de groupes de catéchistes, de groupes d’enfants du catéchisme ainsi que de deux groupes de jeunes collégiens et lycéens d’une aumônerie.
De toute évidence, la synodalité mérite un long apprentissage particulièrement dans les pays occidentaux comme le nôtre fortement marqués par l’individualisme. Cette expérience synodale constitue une première, riche d’enseignements, en particulier dans de nombreux secteurs paroissiaux où la culture du débat n’existait pas ou si peu. Ici et là, un nombre non négligeable de personnes ont pour la première fois et à plusieurs reprises expérimenté une manière de faire Eglise, d’en parler, se sont découvertes dans tous les sens du terme, ont goûté la joie de la parole partagée et en sont satisfaites. Des relations d’estime sont nées. Cette manière de faire vivre l’Evangile aura des lendemains.
A propos de la pertinence du synode, un curé avait intitulé son éditorial dans le journal paroissial en début d’année : « Une occasion à ne pas manquer ». La conclusion d’un groupe de cinq personnes qui a livré sa contribution « après des échanges extrêmement riches et passionnés » lui fait écho : « Cette démarche synodale est une chance inouïe de faire évoluer notre Eglise, de la faire grandir et de porter le message de l’Evangile vers nos concitoyens ».
UN CONSTAT : L’ÉVANGILE A DU MAL A SE FAIRE ENTENDRE
(2) De l’ensemble des contributions reçues dans le diocèse, il ressort expressément ou en filigrane que la Bonne nouvelle a désormais bien du mal à pénétrer les consciences, les âmes et les cœurs dans le tohu-bohu du monde interconnecté et surmédiatisé. Ce monde est plus enclin apparemment à satisfaire des besoins immédiats que de rechercher un sens à l’existence.
Comment donc entrer en relation avec le monde, goûter et faire goûter, voir et faire voir comme est bon le Seigneur après 2000 ans de christianisme ? Deux millénaires ont été marqués par la vie des saints qui ont fait la joie de Dieu mais aussi malheureusement par des ombres mortifères dont la dernière en date – la pédocriminalité de clercs, de religieux, et de laïcs en mission dans l’Eglise révélée par le récent rapport de la Ciase – n’est pas un détail de l’histoire. S’il en était besoin, une des contributions est venue rappeler au groupe diocésain de référence les ravages qu’elle a causés localement.
(3) Avec tout autant de sobriété que de lucidité, les contributeurs ont souvent posé un constat : l’existence d’un « décalage » entre la parole de l’Eglise et celle de la société. Un décalage assumé dans certains cas, car la Parole doit être portée parfois à contre-courant, mais un décalage qui inquiète et quelquefois consterne quand il est la conséquence d’une inadaptation au temps présent. Une inadaptation qui rend le message peu audible. Heureusement, a-t-on constaté, l’encyclique Laudato Si du pape François, bien accueillie jusque dans des milieux hostiles, a prouvé le caractère prophétique que peut avoir la parole de l’Église.
Une bonne nouvelle n’est pas faite pour être conservée. Si elle est porteuse d’un message de libération et de guérison, elle doit être annoncée et alors elle sera entendue. Pourquoi la Bonne nouvelle de l’Amour du Christ dont l’Église est censée être porteuse n’arrive-t-elle pas à être entendue correctement ? Le langage serait-il obsolète ? Le témoignage serait-il insatisfaisant, voire manquant cruellement de vérité ?
- Les 129 contributions, anonymes (21%) ou signées, portées par la prière à l’Esprit-Saint, qui sont parvenues à l’équipe diocésaine de référence, tentent d’apporter quelques éléments de réponse à ces questions. Elles témoignent d’un regard lucide sur ce que nous sommes : les structures, les mentalités, les atavismes, les archaïsmes aussi, qui façonnent les communautés, en les rapprochant ou en les éloignant de la volonté du Christ.
- Il monte de cette somme de contributions comme une petite clameur qui demande une prise de conscience, une purification et une conversion permanente à la Parole du Christ. Tous les baptisés sont appelés à cette conversion et parmi eux les clercs. La contribution d’un groupe de catéchistes rappelle clairement ce que la quasi-totalité des contributions exprime en filigrane : « C’est une conversion personnelle, communautaire, institutionnelle à faire et pas seulement une organisation à changer ».
REVENIR A LA QUESTION : LE CHRIST, POURQUOI ? L’ÉGLISE, POURQUOI ?
(5) Mais pourquoi donc le Christ ? Une contribution écrite au pied du Vallier, sommet qui porte le nom d’un des premiers évangélisateurs de l’Ariège, rappelle que « Dieu, en Jésus, est venu nous révéler son amour pour tous les hommes sans exception et nous dire que cet amour, accepté et vécu par les hommes, était la solution au problème du mal, appelé le péché. C’est la révélation d’un amour universel en réponse à un mal universel. Et cet amour est le sens profond de la vie humaine, la Bonne nouvelle qui apporte « la paix aux hommes que Dieu aime »… Et l’Église a pour mission de continuer la révélation de cet amour universel .»
L’Église a vocation à être lumière des nations (Lumen gentium), et faire en sorte que puissent émerger en son sein des enfants de lumière et pour ce faire, comme le dit une autre contribution, écouter et entendre « ceux qui suivent le Christ, les chrétiens, les éveillés, les chercheurs d’humanité, les mystiques, les enfants, les insoumis… ».
Avec autant d’humilité que de réalisme, elle doit aussi apprendre à scruter « les périphéries » et récolter, comme le disait déjà Justin de Naplouse, père de l’Église du IIème siècle « les semences du Verbe » dans les paroles et les expériences de personnes se trouvant à l’extérieur de l’Église, lesquelles promeuvent sans le savoir l’Évangile.
UNE ÉGLISE, DES COMMUNAUTÉS A L’ÉCOUTE DE LA PAROLE DE DIEU
(6) Pour mieux répondre à la volonté de Dieu, mieux comprendre le monde que le
Seigneur ne veut pas abandonner, beaucoup de contributeurs constatent qu’il est bon d’être à l’écoute de sa Parole. Leur expérience leur fait dire que la Parole touche le cœur, donne du goût à l’existence, rejaillit de manière bienfaisante sur la vie quotidienne en promouvant une vie bonne.
(7) « Si tu frappes à la porte des Ecritures, le Verbe de Dieu t’ouvrira » disait Ambroise de Milan au IVème siècle. Depuis le concile Vatican II, les catholiques ont retrouvé ce chemin de rencontre. De très nombreuses contributions attestent, en effet, le bonheur de recevoir la Parole mais aussi de la partager sous diverses formes d’ailleurs.
« La lecture priante quotidienne de la Bible est la source sûre pour notre conversion », dit une contribution. Une autre tient « à souligner le rapport entre les textes et la vie quotidienne ». Une autre encore assure : « l’Evangile est le socle spirituel qui nous rassemble ». Une jeune femme de quarante ans, récente lectrice à la messe avoue ainsi éprouver une réelle joie. « Lire, écouter, partager la Parole, nous avons confiance en la Parole de Dieu » avoue une autre personne qui déclare être une « recommençante ».
D’autres voudraient partager le bonheur de faire les lectures à la messe mais regrettent que la Parole soit réservée à quelques lecteurs habituels exerçant un véritable monopole. « C’est toujours la même personne qui lit les psaumes » regrette une contribution. Le cas n’est pas rare, les contributions l’attestent.
Dans un certain nombre de cas, des propositions sont faites quant à la diffusion de la Parole du Seigneur attestant une véritable soif qu’elle soit entendue :
« J’ai parlé et non été écoutée quand j’ai demandé de lancer des conférences sur un thème biblique » avoue une paroissienne d’une zone rurale reculée. « Il faut créer un centre d’enseignement de la Bible et des Evangiles » propose un autre. Une contribution très charpentée contient une proposition qui a été expérimentée dans d’autres diocèses : « Il serait bon, je crois, que l’Eglise catholique publie, en nombre massif, des Bibles à un tarif dérisoire… ».
ENTENDRE ET PARTAGER AUTREMENT LA PAROLE DE DIEU
(8) Un certain nombre de contributions évoquent des manières différentes – nouvelles ou redécouvertes – de partager la Parole de Dieu.
Ainsi en est-il dans les vingt-cinq petites Fraternités que compte l’Ariège faisant suite aux orientations prophétiques promulguées par l’évêque. Pour bon nombre de personnes, elles constituent de nouveaux lieux de partage de la Parole qui font leur joie. Elles préparent notamment certains de leurs membres au rassemblement dominical, éveillant à l’homélie et nourrissant l’Eucharistie. Une contributrice avoue : « l’invitation à participer à une fraternité a marqué un tournant dans ma vie…C’est donc tout un parcours qui m’a permis d’accueillir, dans cette petite communauté, la parole des évangiles. Je crois que c’est une grâce qui m’est accordée de connaître le don du Seigneur et son amour pour chacun ».
(9) D’autres contributions souhaitent des approches encore différentes de partage, cette fois à l’occasion du jour du Seigneur.
« Après l’écoute des textes de l’Écriture, avant l’homélie, que des gens en petits groupes de proximité partagent sur ces textes et mettent en écrit l’une ou l’autre phrase qui interpelle et soit partagée à tous. »
Une autre encore exprime la réflexion suivante : « le prêtre en faisant participer les gens au moment de l’homélie permet de l’échange, de l’écoute, du dialogue ; cela permet une approche dynamique des textes de la Bible ».
Une autre contribution souhaite : « un dimanche par mois, une célébration (NDLR : en l’absence de prêtre) comportant la première partie de la messe (NDLR : une liturgie de la Parole) avec des chants puis un partage de l’Evangile du jour avec les participants ».
Le contenu du grand nombre de contributions sur la Parole du Seigneur peut être résumé par ce passage court mais clair de l’une d’entre elles : « Écouter, méditer la Parole de Dieu et prier ensemble nous paraît indispensable à la vie de notre Église ».
UNE ÉGLISE, DES COMMUNAUTÉS QUI RETROUVENT LE SENS DU BAPTÊME
(10) Quand on lit et médite la Parole de Dieu, la Résurrection du Seigneur a une place centrale. C’est pour cette raison que beaucoup de chrétiens, parmi les plus engagés, aiment la Vigile pascale au cours de laquelle on célèbre des baptêmes. Que serait la foi des chrétiens sans la Résurrection ? Une impasse. Nous sommes appelés à ressusciter avec le Christ, c’est-à-dire à être des hommes et des femmes relevés, debout. Tel est bien le sens du baptême.
Retrouver le sens du baptême, prendre conscience qu’il confère à tous la dignité de prêtre, de prophète et de roi, nombre de contributions le rappellent. Prend-on la mesure de cette dignité ? Où est-ce seulement une formule sans véritable imprégnation ?
Le don du baptême et la conscience de la dignité qu’il confère ne permettent pas au baptisé de vivre sa vie par procuration. Une contribution parle d’une conviction « qui engage à être des disciples, c’est-à-dire des témoins de cet amour de Dieu et pas simplement des sympathisants ou des consommateurs d’une religion individuelle sans influence sur la vie. ». C’est là, la dignité des enfants de Dieu. Une dignité que le baptisé peut exercer aussi bien dans la société civile que dans l’Eglise. Une dignité qui engage.
(11) Les contributions déplorent deux attitudes opposées se nourrissant l’une de l’autre, générant, au final, de la souffrance aussi bien chez les fidèles que chez les clercs. Le pape François rappelle : « le cléricalisme est un péché qui se commet à deux ; les prêtres veulent cléricaliser les fidèles et les laïcs demandent à être cléricalisés, par facilité. »
*Un certain nombre de contributions, en effet, pointent du doigt une première attitude : une infantilisation rampante, consciente ou inconsciente, des baptisés par certains clercs. Se mêler des affaires de la communauté tout comme partager correctement la Parole de Dieu serait l’affaire d’une élite. De ce fait – toujours pour de bonnes raisons – il y a dans les paroisses des tâches qui ne sont jamais confiées, des formations qui ne sont jamais proposées, des conseils qui ne sont jamais demandés, des propositions qui ne sont jamais faites, des projets qui resteront toujours dans les cartons par manque de confiance. Au final, il y a trop de personnes en qui on ne croit pas ou qu’on ne prend pas la peine d’écouter réellement. Et pourtant l’apôtre Paul ne disait-il pas aux Galates : « L’esprit a été répandu sur toute chair ». Autrement dit : chacun a reçu l’Esprit du Seigneur.
Des clercs ou laïcs missionnés ont une vision des choses, une façon d’être vis-à-vis de certains fidèles, des attitudes qui créent de réelles frustrations, « des humiliations » a-t-on lu, qui manifestement sont un déni de la dignité de prêtre, de prophète et de roi. Ce comportement blesse et entretient chez certains laïcs un complexe d’infériorité, créant manifestement une interrogation voire un fatalisme : « l’Église changera-t-elle un jour ? » Il n’y a rien de tel pour assécher les motivations. Où est donc la libération que le Christ n’a cessé de promouvoir tout au long de son passage sur la terre ?
* Il y a l’attitude inverse qui arrange bien des baptisés : « S’en remettre au curé voire à quelques laïcs qui paraissent plus aptes ou mieux formés pour gérer toutes les questions d’Eglise ou pour partager la Parole de Dieu ». Certaines contributions déplorent ce désengagement de nombre de fidèles, ce dilettantisme hérité de siècles de pratique qui constitue, en fait, pour le baptisé une mise à distance du Christ : « Or, force est de constater qu’une attitude consumériste tend parfois à s’installer. Il est tellement plus facile de venir, de consommer et de repartir sans vraiment s’impliquer » déplore la contribution d’un groupe. Un désengagement qui a pour conséquence de pousser certains clercs généreux ou qui ont du mal à travailler collectivement, à l’accaparement des tâches, ce qui les conduit à une lassitude dangereuse pour leur santé et celle du peuple de Dieu.
(12) Ces deux attitudes – cléricalisme et désengagement – sont deux plaies qui modèlent les mentalités. Elles perpétuent des formes de surplomb instinctives, plus ou moins conscientes, plus ou moins consenties. Elles révèlent un manque d’espérance dans les capacités humaines et dans la force du sacrement. Elles sapent deux théologies : celle du baptême et celle qui professe que l’Eglise est communion. Ce manque de collaboration est un contre-témoignage qui relègue dans un musée de l’histoire cette constatation que l’on faisait en observant la vie des premiers chrétiens : « Regardez comme ils s’aiment ».
Il y a donc toute une théologie du baptême à retrouver, à enseigner et à mettre en pratique. L’acceptation de la synodalité par les prêtres et les laïcs sera un remède puissant pour guérir de ces maux.
UNE ÉGLISE, DES COMMUNAUTÉS VIVANTES ET QUI ACCUEILLENT
(13) La très grande majorité des contributions portent sur la vie des communautés, particulièrement les contributions collectives : plus de 80% des contributeurs s’interrogent sur la manière de faire Église. C’est la tendance forte de ce Synode : un grand besoin de se sentir en communion entre chrétiens et de saisir tous les moyens, fussent-ils mineurs, pour mettre en cohérence le proclamé et le vécu. Pour que le Cantique de David (Psaume 133) qui dit « Qu’il est bon de vivre ensemble en frères » puisse être proclamé non comme une lettre morte mais comme une évidence expérimentée capable d’attirer le monde au Christ, il faut cette cohérence. Elle est le marqueur et le feu vert pour la mission.
Les chrétiens demandent massivement un signe attestant que la pleine dignité de chacun est reconnue dans l’Église. Pour nombre de contributeurs, il y a comme une évidence : les femmes doivent avoir toute leur place dans l’Église.
• UNE QUESTION DE DIGNITÉ : LA PLACE DES FEMMES DANS LA MAISON ÉGLISE
(14) De manière très conséquente, les contributeurs souhaitent que désormais les femmes se voient reconnues à tous niveaux dans la maison Eglise. A tous les échelons de la société, note-t-on, elles exercent à l’égal des hommes des fonctions qui servent le bien commun. Que serait l’Eglise sans les femmes ? La liste est longue des contributions qui souhaitent qu’elles soient véritablement reconnues dans leur dignité.
- « Pour le monde laïc, il est de plus en plus choquant et même risible de ne pas leur donner leur juste place » dit une contribution. « Le monde avance perpétuellement ; pas de temps d’arrêt. Alors que l’Eglise reste sur un vieux schéma » peut-on encore lire.
Un contributeur ajoute : « Il est assez paradoxal de constater que la religion catholique et la légion étrangère (pour des raisons différentes) sont les seules entités où la femme n’est pas traitée en ce XXIème siècle à l’égal de l’homme ».
- Une autre voix situe le problème au niveau de l’évangélisation : « les catholiques auront de plus en plus de mal à évangéliser face à une société où la représentation des femmes s’approche de 50% dans tous les domaines. Sur ce point, l’image surannée de l’Eglise n’est pas porteuse. Et surtout, le regard de l’Eglise sur le monde ne peut être que celui d’un borgne ».
- Il est significatif qu’un certain nombre de contributeurs fondent leur souci de reconnaissance des femmes sur les textes des Evangiles citant parfois les références des passages bibliques, capacités qui n’existaient pas avant le Concile Vatican II. Parmi ces contributeurs, l’un d’entre eux remarque : « Si dans ‘l’Eglise’ de Jésus les apôtres étaient des hommes, les femmes étaient très présentes auprès de Lui et même plusieurs fois, il est passé par elles pour l’annoncer : la Samaritaine, Marie-Madeleine au pied de la croix, ce sont les femmes qui sont là. Marie aux noces de Cana prend l’initiative de dire : ‘faites ce qu’il vous dira’. »
Une autre contribution note : « Jésus a pris des femmes pour en faire ses témoins sur les grandes vérités du Royaume… Ce sont elles qui, les premières, l’ont vu vivant et qui ont reçu mission d’en informer les apôtres (Mt 28,9-10). »
• QUELS TYPES DE MISSIONS OU DE MINISTÈRES POUR LES FEMMES ?
(15) Pour ce qui est des missions que devraient pouvoir exercer les femmes, les contributions sont fournies.
- Beaucoup demandent que les femmes soient dans tous les conseils ecclésiaux, les équipes d’animation pastorales (EAP), les conseils épiscopaux, la conférence épiscopale, les organes du Vatican. Notons que le diocèse de Pamiers, de manière significative, compte 4 femmes au conseil épiscopal depuis plusieurs années : une religieuse et trois laïcs.
- Il est souhaité, précisent certaines contributions, qu’elles aient non seulement une « responsabilité participative mais décisionnelle ».
- « que des femmes et des hommes compétents puissent commenter l’Evangile et non uniquement les prêtres et les diacres »
- C’est aussi aux séminaires que s’intéressent certains contributeurs en demandant que des femmes y soient enseignantes et intervenantes.
- Reste la question des ministères qu’aborde un très grand nombre de contributions. Celles-ci se prononcent pour l’accès des femmes aux ministères et pour beaucoup d’entre elles à tous les ministères. « Je rêve d’une Eglise où des femmes puissent être ordonnées prêtres » dit une contribution suivie par 22 autres principalement collectives.
De manière significative, c’est sur le ministère diaconal confié aux femmes qu’insistent davantage les contributeurs ; une manière, peut-être, de ménager les transitions.
• UNE ÉGLISE, DES COMMUNAUTÉS DE RELATION
(16) Une imposante majorité de contributions en appelle à trouver des chemins de Communion. Elles font état soit de la quasi-inexistence de communication dans certaines paroisses, soit de faiblesses, soit tout simplement de la volonté d’améliorer ce qui existe déjà. A plusieurs reprises a été formulé par les contributeurs, un vœu : « Il s’agit de passer de la définition d’une paroisse comme lieu de culte et de célébration des croyants à un lieu de vie de la communauté des disciples missionnaires du Christ. »
« Une communauté chrétienne doit pouvoir se réunir régulièrement pour échanger sur sa vie, son fonctionnement et exprimer ses attentes » rappelle une contribution. Cette constatation vaut tant pour l’échelon paroissial que diocésain. « Il semble pertinent de réunir régulièrement tous les chrétiens du diocèse et renouveler ainsi l’expérience de réunions annuelles diocésaines pour faire des propositions utiles et constructives pour transformer l’Eglise et essayer de la réparer » note une autre contribution.
(17) Des propositions, en très grand nombre et d’inégale importance, sont exprimées pour favoriser une communion réelle, visible et donc missionnaire. Ajoutées les unes aux autres, elles ont vocation à changer le climat des paroisses qu’on pourra alors qualifier de communautés. Y-a-t-il, en effet, communauté si la paroisse n’est dotée d’aucune équipe d’animation pastorale (ou de simple façade) mais bénéficie seulement du dévouement de quelques bonnes volontés ? Y-a-t-il communauté si les responsabilités sont confiées ad vitam aeternam à un cercle restreint de personnes qui n’en finissent pas de monopoliser les fonctions ? Y-a-t-il communauté s’il n’y a pas de projet pastoral partagé, de personnes officiellement missionnées et connues qui servent de relais entre le curé et les fidèles ? Y-a-til communauté s’il n’y a pas de véritables lieux d’expression ? Y-a-t-il communauté si les paroissiens ne mangent jamais ensemble ou forment, lors des repas, des chapelles d’affinités ? Y a-t-il communauté si les plus petits sont invisibles dans les paroisses ? La réponse est évidente : il y a une paroisse, des fidèles mais pas de communauté. Et donc pas de véritable communion. Comment donc peut être alors annoncé l’Evangile dans ces conditions ?
A quoi aspire-t-on ?
(18) Que soient créés de véritables conseils pastoraux avec une véritable vision pastorale qui régulièrement fasse l’objet d’une évaluation ; que leurs ordres du jour soient annoncés à l’avance afin qu’il fassent éventuellement l’objet de discussions ; que l’on fasse des comptes-rendus des décisions prises, y compris économiques, tout sauf sommaires, dans des lieux et des moments où la communauté est la plus nombreuse possible mais aussi dans des publications appropriées pour que circule l’information et que soient portés, par un nombre le plus large possible, les soucis et les joies de la communauté. Que la composition de ces conseils soit largement diffusée afin que leurs membres servent de relais utiles, et qu’un certain nombre d’entre eux soient peut-être élus et toujours pour une durée limitée afin d’éviter la monopolisation des rôles. Il serait intéressant que des représentants élus des associations et services d’Église maillant le territoire intègrent ces conseils. Que des permanences soient organisées dans les paroisses ; que les panneaux d’information des églises soient copieusement nourris.
DES COMMUNAUTÉS OUVERTES, ACCUEILLANTES, UNIES
(19) Une formule, en deux mots, devrait guider les pas des communautés : « Aller vers ». On la retrouve dans les contributions. « Aller à la rencontre les uns, les autres… Aller au-devant des personnes des périphéries, des personnes handicapées mentales, des personnes en grande précarité. Ne pas hésiter à écouter ceux qui contestent l’Eglise ou les religions… sentir les contestations, oser. Il est important d’appeler, de permettre à chacun d’avoir un rôle dans la communauté chrétienne et ensuite de faire rencontrer les uns et les autres ».
D’autres évoquent le nécessaire accueil des nouveaux venus dans les paroisses mais aussi des vacanciers. Une contributrice évoque les longs mois qu’il lui a fallu pour qu’elle reçoive un simple bonjour dans son lieu de rassemblement dominical. « Il nous semble primordial de créer un service paroissial dédié » dit une autre contribution qui ajoute la proposition concrète d’organiser, avec l’idée d’un brassage, des repas 4/4, des petites tablées « de quatre personnes qui se réunissent quatre fois dans l’année. »
Un certain nombre de jeunes ont débattu à l’occasion de ce synode. Si le langage de l’Eglise leur pose maintes interrogations, ils avouent que si on leur demandait de participer aux célébrations en tant qu’acteurs, leur intégration serait beaucoup plus facile. Beaucoup d’entre eux souhaiteraient des célébrations plus vivantes, plus gaies, plus adaptées. Cet avis est partagé par beaucoup d’adultes qui aimeraient aussi que la sonorisation des églises soit efficace.
(20) Si de nombreuses contributions évoquent le désir de nourrir les relations avec d’autres confessions chrétiennes, notamment protestantes et anglicane, certaines évoquent le souci d’unité à l’intérieur des communautés catholiques. Une contribution demande le respect des différences et notamment de toutes les liturgies de la messe. Une voix résume un désir d’unité avec des paroles bien senties : « Un des points qui m’interroge : au sein même de notre Eglise, l’incompréhension qui existe entre chrétiens quand il s’agit de querelles entre chrétiens progressistes et plus « tradi » ; ces guerres fratricides nous déshonorent, elles sont inadmissibles ».
Un petit nombre de contributions insiste pour que les prêtres et les communautés s’inspirent davantage d’expériences intra et extra diocésaines : « Il est important d’aller voir ce qui se passe ailleurs, de favoriser les jumelages, les échanges entre communautés… »
LES FUNÉRAILLES ET AUTRES RASSEMBLEMENTS EXTRAORDINAIRES
(21) Il est demandé que tous les événements qui rassemblent des personnes ne fréquentant pas ou très peu l’Eglise soient particulièrement soignés avec une liturgie et un langage très appropriés, les funérailles notamment. A leur égard, plus de formations, des partages d’expériences seraient indispensables.
L’ORGANISATION DE LIEUX PRIÈRE ET DE RENCONTRE
(22) Si les contributeurs de villages souhaitent l’organisation d’une ouverture régulière de leur église, il est également demandé que soient pensés des lieux nouveaux de rencontre. « Je vois bien une Église qui crée des conditions favorables à la rencontre, à l’accueil, à l’invitation, aux liens qui se créent. J’imagine qu’il faut des lieux, des temps, des événements, des rendez-vous diversifiés » reconnaît un contributeur. En nombre significatif, des contributions émanant de différents lieux de l’Ariège, citent les Parcours Alpha qui ont permis des commencements et recommencements. Les Tables ouvertes, le pélé VTT, les JMJ, les équipes CVX, du Rosaire et du MCR, autres formes de communion, sont aussi appréciées.
Un prêtre pense que l’intérêt pour la parole d’autrui « justifierait des structures de dialogue ouvertes à tous, sans arrières pensées de prosélytisme, simplement pour échanger. Il y a certes des réunions mais elles restent trop souvent fréquentées par des croyants, pratiquants ou non, mais non par des gens extérieurs à l’ambiance ‘Eglise’. Ces structures de dialogue seraient un moyen de rencontrer ainsi des personnes ‘extérieures’. ». Cette proposition se situe plus globalement dans la culture du débat qui émerge des contributions.
LES PERSONNES HOMOSEXUELLES
(23) La nécessité de voir l’Eglise se repositionner quant à la place des personnes homosexuelles se retrouve dans plusieurs contributions. Elle mérite une attention forte. En témoigne cette contribution : « Quand, dans une famille, un enfant annonce son homosexualité à ses parents : vont-ils le rejeter ? le bannir de la famille ou l’accepter tel qu’il est, l’aimer toujours autant et peut-être même encore plus. L’Eglise n’est-elle pas une mère pour chacun de ses enfants ? » Comment peut-on encore imaginer de nos jours un refus d’inhumer religieusement ? Qui suis-je pour juger ?
DIVORCES REMARIES
(24) Dans les contributions, ils sont souvent apparentés aux exclus. Leur cas est évoqué parfois avec des témoignages poignants. La détresse de certains n’est pas admissible. Certains clercs ont été inhumains. Un groupe note « nous souhaitons que les personnes qui ont subi de plein fouet un divorce puissent être accueillies et recevoir le sacrement de l’Eucharistie. » Un autre parle de « seconde chance ». Une contribution parle de réintégration après une demande de pardon. A ce titre, on peut noter que certaines communautés ont mis en place cette démarche. « Que celui qui n’a jamais péché lui jette la première pierre ».
LES MIGRANTS
(25) Souvent évoqué, rarement développé, leur cas fait partie des « bonnes actions » à faire mais ils sont bien éloignés de nos communautés et ne font pas partie de nos paysages… Un gros effort est à faire par nos communautés et nos pasteurs. Ces personnes sont là en nombre dans notre diocèse rural (mineurs isolés des centres d’apprentis, demandeurs d’asile déboutés ou en voie de régularisation à qui on demande des sommes exorbitantes pour obtenir leurs papiers…) mais ils sont si discrets que personne ne les voit ! N’est-ce pas cependant notre devoir d’aller vers eux ?
UNE PORTE OUVERTE : LE LANGAGE DE LA SIMPLICITÉ, L’HUMILITÉ
(26) On a dit que la communication était le début de la communion. Encore faut-il que la parole soit comprise, que le langage soit approprié, adapté à celui à qui on s’adresse.
Une anecdote. A l’occasion d’une rencontre synodale joyeuse dans une équipe du Secours catholique, après maints préliminaires sur la signification de « marcher ensemble », la question est venue de savoir comment réparer l’Eglise. Une réponse a fusé : « Oui, à l’entrée de la cathédrale, il y a une pièce métallique dangereuse qu’il faudrait bomber de fluo ou enlever pour éviter que les gens ne tombent ». On aurait bien tort de se gausser de cette réponse, surtout quand on sait que Saint-François, le povorello en personne, avait cru comprendre dans un dialogue intérieur avec le Christ qui lui disait : « François, il faut réparer mon Eglise », l’ordre pour le jeune d’Assise de réparer matériellement l’église San Damiano.
Avec quels mots, l’Eglise s’adresse-t-elle au monde et spécialement aux jeunes aujourd’hui ? La contribution d’un prêtre est éloquente : « Nous n’avons pas ou très peu aujourd’hui, une vraie connaissance de la culture et du langage biblique : des mots comme rachat, rédemption, salut, sauveur, sacrifice, rémission, agneau pascal… et certaines pratiques comme certaines formes de prière ou de rituel, notamment dans la célébration des sacrements, n’ont plus guère de sens pour beaucoup, croyants ou non. ». Une dame âgée ajoute « J’aimerais que l’on parle plus simplement. J’ai du mal à tout comprendre. Le plus important est la prière, l’honnêteté, la simplicité ».
Une contribution collective ajoute : » Il nous engage beaucoup moins de dire « Credo in unum Deum » même si l’on sait ce que cela veut dire que d’affirmer et proclamer « Je crois en Dieu« .
S’il y a le langage des mots, il y a langage des vêtements et le langage de l’attitude. « Plus de simplicité, plus d’humilité, un langage plus de notre temps » demande une autre contribution. Un curé remarque « la simplicité dans les vêtements liturgiques, le langage, les gestes me semblent le premier chemin pour rejoindre tous les hommes, croyants ou non. Grâce à Dieu, nous avons beaucoup avancé sur ce chemin et en particulier avec le pape François. ». L’appel à l’humilité et la simplicité, y compris dans la manière de dénommer les clercs, se retrouve souvent dans les contributions.
LA FORMATION – LE SUIVI DES catéchumènes
(27) Il y a une demande générale de formation. Son organisation requiert un sens aigu de l’adaptation (personnes, lieux, dates et horaires). La catéchèse ne doit pas être réservée aux enfants. Elle passe aussi par les parents et adultes. Comment peut-on être catéchiste sans formation permanente ? C’est là une exigence baptismale. Les catéchumènes, après leur baptême, doivent être accompagnés, suivis et personnellement intégrés dans les communautés.
LES PRÊTRES, AUJOURD’HUI ET DEMAIN, LA SYNODALITÉ
(28) On l’a ressenti à l’occasion de rencontres, la démarche synodale a créé des craintes chez nombre de prêtres qui d’ailleurs ne se sont pas exprimés dans des contributions. Pensent-ils que ce synode est une manière de minimiser leur ministère ? Pourtant aucune contribution ne vient contester ce ministère.
S’il en était besoin, les contributions reçues viennent contredire cette crainte. Telle celle qui cite le curé d’Ars « Qu’il n’y ait pas de prêtre dans une paroisse et, au bout de vingt ans, on finira par adorer les animaux ». Une fraternité « salue leur investissement pour toutes les messes qu’ils assurent dans toutes nos vallées. C’est un véritable ‘marathon’ tous les weekend et pour toutes les fêtes ». Une contributrice constate encore « ils sont indispensables, leur mission est admirable, ce sont des porteurs et diffuseurs de l’Evangile, les premiers missionnaires » et d’ajouter « il faut définir et redéfinir leur place, leur spécificité ».
En revanche, c’est la manière dont est exercé le ministère qui interpelle les contributeurs. C’est la manière de faire Eglise qui est l’objet de toutes les préoccupations. Et là, il y a visiblement de nombreux progrès à accomplir. A certains endroits, des révolutions. Finalement les contributeurs sont demandeurs de synodalité. Ils font leur le logo universel du Synode qui présente significativement un évêque, un prêtre, une religieuse au milieu d’un peuple en marche.
Pas de prêtre, pas d’Eucharistie, pas d’Eglise catholique. C’est pour cette raison que beaucoup de contributeurs s’inquiètent du petit nombre de candidats au ministère de prêtre, sur la manière de remédier à ce tarissement. Ils s’intéressent aussi à la formation continue des prêtres et des futurs prêtres qui doit être en prise avec la vie des hommes et des femmes, ouverte aux nouvelles matières qu’explore la société et comporter un volet de formation à la synodalité qui sera source de fraternité. L’évangélisation est dans la réponse à la question :
« Pourquoi le Christ ? »
(29) Comment faire pour que l’Eucharistie soit vécue régulièrement par le peuple de Dieu ? Comment pallier le tarissement des candidats au sacerdoce ? Un grand nombre de contributions (34), pour beaucoup collectives, manifeste la volonté d’ordonner des hommes mariés. Certaines, pour asseoir leur souhait, font référence à l’expérience de l’apôtre Pierre et dans la foulée des Eglises d’Orient. Un contributeur, qui a creusé la question et se projette dans l’avenir, souhaite que le prêtre « sache ce que c’est que de gagner son pain, comme le faisait l’apôtre Paul ; qu’il ait l’expérience de la vie et de la responsabilité d’une famille. Bref un missionnaire, pasteur déjà mûr, formé aux réalités du monde… ».
Pour autant, très rares sont les contributions qui vont au-delà de l’affirmation du souhait de voir ordonner des hommes mariés. Seule une contribution approfondit dans un long document d’ailleurs, la question de la sacralisation des personnes et des fonctions, civiles et religieuses, la question du service aussi.
Voilà ce que souhaitent les contributeurs. On ne peut plus faire l’économie d’une véritable collaboration entre les prêtres et les laïcs. Il faut notamment que les prêtres veillent en permanence au surgissement des charismes des laïcs.
Quelles que soient les évolutions qui seront décidées à plus ou moins long terme, l’enjeu c’est qu’une véritable communion existe au sein de l’Eglise. Et que cela se voie depuis l’extérieur pour attirer nombreux au Christ les chercheurs de Dieu.
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