Entretien avec Pierre Fresson, vicaire général du Diocèse aux Armées
La présence d’un nouvel aumônier militaire à 1er RCP, à Pamiers, et le passage dans notre diocèse, durant la périodes des fêtes, d’un groupe de séminaristes du Diocèse aux Armées, avec leur Vicaire Général, nous donnent l’occasion de réfléchir à cette mission particulière. Sylvain Moreno, natif de Belesta, en formation avec le Diocèse aux Armées Françaises, a été à l’initiative de cette démarche. Catherine Decout, de l’EAP de Saint Girons, nous donne ici des éléments intéressants, fruits d’un entretien avec le Père Pierre Fresson.
Pierre Fresson, qui est aussi l’aumônier national de la Marine, accompagnait, en cette fin d’année 2020, huit séminaristes dont 2 diacres pour vivre un stage en immersion dans le diocèse de Pamiers.
Sylvain, l’un des séminaristes, que nous avions eu un an à Saint Girons, avait proposé et organisé ce stage. C’est au centre paroissial de Saint Girons qu’ils finirent leur séjour. Et pendant deux jours ils suivirent les abbés Bertrand et Jean pour percevoir ce que pouvait être une pastorale en milieu rural et montagnard.
Après un repas au centre paroissial auquel l’évêque Jean Marc Eychenne s’était joint, Pierre Fresson
accepta de parler de ce milieu particulier des aumôniers militaires.
Une laïcité bien comprise et bien vécue
Le diocèse aux Armées a été créé sous le pontificat de Jean Paul II et fait l’objet d’un accord entre le Vatican et l’Etat français. L’évêque aux Armées, en effet, est en même temps Aumônier Militaire en Chef du Culte Catholique et est nommé par le Ministère des Armées après consultation des instances concernées du gouvernement.
L’ensemble des aumôniers comprend pour deux tiers des prêtres, il y a aussi des aumôniers femmes (dans les hôpitaux par exemple) et des diacres, certains à plein temps, d’autres à temps partiel, certains rattachés au diocèse aux Armées, d’autres prêtés par des diocèses ou des communautés pour un temps limité.
L’aumônier militaire, lui, fait partie d’emblée de l’institution militaire ; sa vie quotidienne rentre dans le cadre générale de l’armée et son intégration en est ainsi grandement facilitée.
Qu’est-ce qui peut attirer un jeune vers l’aumônerie militaire ?
Au départ il y a l’influence de la famille ou d’amis. Par ailleurs, le jeune séminariste peut aussi être tenté par l’aspect missionnaire et par un certain parfum d’aventure en ayant la possibilité de voyager vers des contrées exotiques et lointaines.
Faire partie d’une communauté
Quand un aumônier militaire arrive sur son affectation, il est souvent testé, par exemple en lui demandant de participer à un exercice. On le sort ainsi de « sa zone de confort » pour apprécier sa manière de se comporter. Cela crée des liens et il fait alors partie de la communauté.
Vivre dans une communauté relativement jeune, entre 18 et 55 ans, ce n’est pas celle que l’on retrouve majoritairement dans les églises le dimanche. L’aumônier, parce qu’il est intégré à cette communauté et partage sa vie quotidienne, va d’autant plus facilement être sollicité quand se posent les questions existentielles, au moment d’un deuil, ou pour une demande de sacrement, baptême, mariage, etc…
Une communauté attachante : contrairement à ce que l’on pourrait croire, c’est une communauté pacifique, sa première mission est de servir le maintien ou la restauration de la paix. Et cela jusqu’au sacrifice de sa propre vie ; ce qui ne laisse indifférent un prêtre qui retrouve là un aspect christique.
Dans l’homélie qu’il a prononcée à Saint Lizier le 1er de l’anpour fêter Sainte Marie, Mère de Dieu, Pierre Fresson a présenté rapidement le rôle de l’aumônier militaire et a poursuivi en faisant le rapprochement entre l’attitude de Marie qui « garde toutes ces choses en son cœur » avec ce que l’on pourrait appeler « la garde du coeur » dans des contextes d’opérations tendues où se tenir sur une sorte de ligne de crête est indispensable pour ne pas basculer dans les engrenages de la violence.
Des exemples d’interventions actuelles
La Marine est affectée à la surveillancedes eaux territoriales françaises : par exemple, aujourd’hui, empêcher les pêches illégales dans les eaux territoriales françaises de Guyane ; surveiller les trafics entre Mayotte et les Comores. La haute mer, en dehors des eaux territoriales, se présente parfois comme une zone de non droit ou se passent tous les trafics de piraterie auxquels la Marine a souvent l’occasion de faire face, en sauvant parfois des vies.
Actuellement les forces de l’ordre sont engagées dans l’organisation Frontex, coopération européenne qui a la mission de contrôler les frontières, en particulier pour démanteler les réseaux de passeurs.
Sur les théâtres d’opérations, notamment quand un pays demande de l’aide pour faire face à de graves problèmes (comme au Mali actuellement), l’armée a pour mission de rétablir la confiance, dans des contextes ou tout se tient : politique, le sécuritaire et l’économique. Son rôle peut consister, en plus de l’aspect militaire, à la mise en place d’un service médical, d’un point d’eau, etc.
Le père Pierre Fresson a évoqué, à la fin de notre entretien, l’attitude de la France sur le plan international : aujourd’hui les règles du droit international et les conventions sont de moins en moins respectées, y compris par de grandes nations, or la France est très attentive et depuis longtemps à les respecter.
Et cela peut constituer pour les lecteurs de cet entretien un vrai sujet de fierté.
Propos recueillis par Catherine Decout
le 2 janvier 2021