Message de Pâques – Échapper au confinement du tombeau…
Ressusciter, c’est échapper au tombeau et à son confinement…
Oui, mais pour s’ouvrir à un autre vie, à un autre mode de vie, sinon à quoi bon !
La fête de Pâques de cette année 2020, vécue dans un contexte si particulier, peut-elle marquer un passage (Pâques vient de l’hébreu « Pessa’h », qui signifie passage), une transition, vers autre chose ? Connaitrons-nous ce changement de société, trop longtemps repoussé ? Tirerons-nous les leçons de cette période si singulière, marquée par l’angoisse (et pour certains la mort et le deuil), en remettant vraiment en cause un modèle de société aux conséquences sociales et environnementales désastreuses ?
Certains d’entre nous, confinés dans un contexte relativement favorable à la réflexion, nous ont donné à penser dans leurs écrits, ou leurs prises de parole sur les réseaux. Qu’ils soient croyants, d’une foi ou d’une autre, ou de toute autre référence de pensée.
Il ressort souvent de leur apport que nous avons aujourd’hui, en raison de ce qu’induit cette pandémie, une chance à saisir pour réorienter le cours de l’histoire de l’humanité (rien de moins). Tous les arguments de raison n’avaient suffi à convaincre qu’il ne s’agissait pas seulement d’aménager, à la marge, un modèle de développement économique, mais qu’il fallait en changer. Or voilà qu’un virus, inattendu et très agressif, pourrait peut-être emporter l’assentiment de tous (ou presque…).
Mais la tentation sera forte de penser que le défi d’après confinement serait de retrouver, le plus vite possible, la situation antérieure. Alors nous nous remettrions à surconsommer, à avaler des kilomètres sans raison valable, à prendre l’avion pour une base de loisirs situé l’autre bout du monde, à penser que la protection sociale et sanitaire sont bien coûteuses, à valoriser l’enrichissement sans fin, à idéaliser la croissance, à ne voir dans la nature qu’une ressource à exploiter, etc… Ce faisant nous serions même alors, nous diront certains, de bons citoyens, car nous contribuerions ainsi à remettre le pays et le monde debout en relançant la « machine économique ». Mais si, par malheur, nous écoutions ces prédicateurs ce serait une très mauvaise nouvelle. Tant de peur, de souffrances et de deuils, finalement pour rien, pour que tout reprenne comme avant…
L’apôtre Paul, témoin indirect, de la mort et de la résurrection du Christ, exprimait cela avec ses mots, en disant à ceux qui entendaient ne rien changer et continuer à se conformer à la logique du monde, qu’ils rendaient « vaine la croix du Christ ».
Oui, mon vœu le plus cher pour cette Pâques chrétienne bien particulière, qui suit de peu la Pâque juive (Pessa’h) et précède de peu l’entrée dans le ramadan des musulmans, c’est que nous vivions, quelles que soient nos références religieuses ou philosophiques, une vraie transformation de nos styles de vie individuels et collectifs. Ceci afin que l’humanité puisse entrer dans une nouvelle ère. Ère dans laquelle les humains, et toutes les créatures, primeront sur l’économie. Ce n’est pas autre chose qu’espérait le Pape François ces derniers jours en nous invitant à « passer de l’abus de la nature, à sa contemplation ».
Voilà le défi : Vivre un véritable « passage », une vraie Pâques, sans revenir à nos vieilles lunes !
+ Jean-Marc Eychenne – Évêque de Pamiers, Couserans et Mirepoix
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